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LETTRE D'INFORMATION |

Réfléchir et s’organiser pour rendre l’agonie attractive

dimanche 30 août 2009
par Olivier Vermert

Tandis que le maire de Toulon baguenaude dans les pâturages ministériels, son université crève. Il avait le choix : ruer dans les brancards et contrarier la ministre qui lui a vendu la LRU, ou s’aplatir mollement. Il a choisi la surdité.

REMARQUE du socialiste Robert Alfonsi lors d’un conseil municipal largement consacré au « pôle universitaire » [1] : « je souhaiterais pour ma part qu’on aborde le sujet de l’université en conseil municipal ou de TPM, autrement que par le biais des questions d’urbanisme ».
Réponse de Hubert Falco : « j’aimerais bien, mais on ne peut pas se substituer à l’université. C’est à elle de réfléchir et s’organiser pour se rendre attractive. Moi, j’aimerais bien. Mais après, on va encore dire : de quoi il se mêle, celui-là ».

Rassurons le maire : "on" serait mal inspiré de lui dire « de quoi il se mêle celui-là ». "On" l’a en effet sollicité pour un rendez-vous, "on" lui a remis un dossier sur la situation préoccupante de l’USTV, "on" lui a clairement signifié qu’il serait opportun de défendre le cas des petites universités auprès du gouvernement.

Hubert Falco a tort de se désintéresser de l’USTV même s’il prétend le contraire. À l’automne prochain, la même agence gouvernementale qui a rédigé un rapport assassin sur la gestion de l’université revient à Toulon pour un audit conditionnant son avenir. Sang et larmes en perspective. L’USTV ne survivra sans doute plus très longtemps sous sa forme actuelle, rattachée à Marseille ou Nice, ou alors déclassée en collège universitaire sans Master ni recherche. Falco ne pourra pas dire qu’il n’était pas au courant.

17 semaines de mobilisation universitaire, un rendez-vous, zéro résultat.

Reprenons du début : février. L’opposition à la loi LRU s’organise en coordinations locales réunissant, dans la plupart des universités, étudiants et personnels.

À l’issue d’une assemblée générale, la coordination toulonnaise convient avec le Président Oueslati de rencontrer le maire de Toulon. Sur le campus, tout le monde est à peu près d’accord : il y a des raisons de s’inquiéter [2]. Depuis octobre, quand la contestation n’intéressait encore que la composante IUT, les trois députés UMP de l’agglo (Giran, Lévy, Vitel), le maire UMP de la Garde (Masson), le maire PS de la Seyne-sur-Mer (Vuillemot) [3] et quelques conseillers généraux, ont entendu et parfois relayé l’inquiétude universitaire. Ne manque donc que le maire de Toulon. Il est prévu que Oueslati s’occupe du rendez-vous.

Le temps passe. La coordination réalise que la rencontre à trois ne se fera jamais : les louvoiements stratégiques du président de l’USTV ne le permettent pas. Il n’a manifestement aucune envie de rencontrer Falco avec ou sans coordination. Peur de lui donner une impression de faiblesse, de témoigner d’un échec, lui, petit élu de gauche à qui certains prêtent le désir d’intégrer le gouvernement avec la mention "ouverture", depuis qu’il a accompagné Sarkozy en Tunisie ?
La coordination reprend les choses en main. Elle rencontrera Falco, seule.

En mairie, on explique que le rendez-vous ne peut être pris par téléphone, qu’il faut envoyer une lettre ou un courriel argumenté, et qu’une réponse favorable — ou non — sera retournée d’ici une quinzaine de jours. Après tout, il est vrai que le grand homme est occupé : à cette époque il aménage encore le territoire un peu partout en France. Remarquons juste que pour l’interview d’avant municipales, il aura suffi d’un tout petit coup de fil de rien du tout de la part de Cuverville pour que le cabinet du maire programme une audience dans les trois jours.
Mais ça n’a rien à voir, soyons patients. Un courriel est envoyé le 13 mars.

Parce que ça dure, cette histoire, les plus virulents des contestataires décident, d’abord, de brûler une palette sur une rampe d’accès de Grand-Var, et ensuite, d’entamer un sit-in devant la mairie en précisant aux fonctionnaires des RG qui les encadrent qu’ils sont venus avec des duvets et comptent rester jusqu’à l’obtention du rendez-vous. On a essayé de les renvoyer vers Robert Cavanna (adjoint à l’enseignement supérieur) ou Geneviève Lévy mais ils ne veulent rien entendre. Deux heures après le début du sit-in, la fonctionnaire des RG revient vers le porte-parole de la délégation. Sourire aux lèvres, elle lui indique que le rendez-vous est obtenu.

Le jour J, Hubert Falco est accompagné de Robert Cavanna. Il accueille six membres de la coordination : « vous savez, je rencontre tous les gens qui le désirent ». Ils lui expliquent la situation, lui remettent un dossier argumenté de quatre pages.

Hubert les rassure aussitôt sur tous les points sensibles. Trop d’assurance tue la pertinence : il ignore manifestement ce que peut impliquer la LRU. La délégation compte toutefois sur l’argumentaire dont ses conseillers se sont emparés pour tenter d’allumer en lui, sinon le feu, au moins l’étincelle de l’inquiétude.

Mais le problème du maire de Toulon, sans spéculer sur l’intérêt personnel qu’il pourrait porter à ce dossier, est qu’il se trouve coincé sur le plan politique, ou plus exactement, sur son avenir politique : comme Maire et Président d’agglomération, il ne peut qu’être alarmé des conséquences de la LRU sur la vie socioéconomique locale. Comme Secrétaire d’état, il ne peut manifester le moindre désaccord avec une ministre star du gouvernement, au plus fort de la crise universitaire. Nous disions qu’il avait tort de se désintéresser du sort de l’USTV : cela dépend du point de vue. Concernant sa petite carrière personnelle, Falco fait le bon choix.

Un mois plus tard (17 avril), la délégation reprend contact avec la mairie pour connaître les conclusions des conseillers du maire après lecture de l’argumentaire. Le directeur de cabinet indique que « son étude est en cours ».
Un mois sans réussir à décortiquer 4 pages écrites dans un français vulgaire même pas exempt de fautes d’orthographe, on peut trouver ça long. Bon. La délégation en profite pour demander un nouveau rendez-vous avec Robert Cavanna cette fois-ci, comme ça on n’aura peut-être plus besoin de brûler de palettes pour l’obtenir.

Le cabinet de l’adjoint accepte le rendez-vous, ce sera un vendredi de mai, « de toute façon c’est la seule date que nous pouvons vous proposer aujourd’hui car monsieur Cavanna part en vacances la semaine prochaine ». OK alors, disons vendredi.
La veille de la date convenue, le cabinet rappelle : « je suis désolée mais je crois que ça ne va pas être possible, car monsieur Cavanna a un autre rendez-vous très important. Ne vous inquiétez pas, il vous recontacte dès son retour de vacances ».

Samedi 29 août, rédaction de cet article.
Depuis mai, l’interlocuteur de la coordination a maigri. Il ne mange plus ni ne se rase, reste prostré devant son téléphone en attendant des nouvelles de monsieur Cavanna. Et il ne peut s’empêcher de remarquer, jour après jour, à quel point elles sont longues, les vacances des adjoints.

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P.S.

Lire aussi : Monsieur le Secrétaire d’État, assumerez-vous la disparition de votre université ?

[1] 28 août 2009, propos rapportés par Var matin.

[2] Cela dit, tout le monde ne s’inquiète pas pour les mêmes raisons. Certains défendent le service public, d’autres leurs prérogatives.

[3] Le campus de l’USTV est situé sur la commune de la Garde, l’IUFM est installé à la Seyne.

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