IL y a ce type, Serge Melniczuk, que l’adjoint toulonnais au commerce d�crit comme « un homme dynamique ». Depuis quelque temps, le type fait du lobbying aupr�s de la mairie en vantant les m�rites des dispositions l�gislatives qui permettent l’ouverture des commerces le dimanche. Le d�cret d’application de la loi dite "Malli�" date de septembre 2009.

Est-ce parce qu’elle aime les hommes dynamiques ? L’�quipe municipale a install� une commission pour plancher sur l’ouverture dominicale, elle sera pilot�e par l’expert Melcniczuk. Deux �ch�ances : un rapport devra d’abord mettre en �vidence « l’int�r�t touristique » de la ville de Toulon. Convaincu, le Maire soumettra ensuite le dossier au Pr�fet.

Convaincre ses acteurs que Toulon, ville littorale dont les c�tes sont phagocyt�es � 80% par la Marine nationale, est touristique !

Oui, parce que sur l’int�r�t m�me de l’ouverture dominicale il n’y a plus de question � se poser. Tel le taureau devant la croupe d’une vache distraite, l’homme dynamique fonce vers le centre ancien. On peut se fier � la neutralit� bienveillante du pr�sident de la commission : Melniczuk g�re trois ou quatre McDo, il est aussi pr�sident de l’association des commer�ants du centre commercial Mayol.

Bon d’accord. Si on enl�ve au centre les commerces ne fonctionnant qu’avec un g�rant ou, soyons fous, un g�rant plus un salari�, il ne restera plus beaucoup d’enseignes. Elles ne sont d�j� pas tr�s nombreuses.
Bon d’accord. Leur demander d’ouvrir le dimanche est parfaitement surr�aliste � moins d’obliger ces feignants � installer l’appartement familial dans l’arri�re boutique, � l’ancienne, pour fonctionner en trois-huit. Sinon je les vois quand, mes gosses ?

« L’ouverture dominicale est bas�e sur le volontariat mais ce n’est pas une obligation », dit Serge Melniczuk [1]. Ah bon, tu me rassures. Il para�t que Serge Melniczuk est lui-m�me volontaire pour venir servir ses frites industrielles juste apr�s la messe. Quand on aime sa ville, il faut savoir faire des sacrifices.

D’ailleurs, depuis la loi de 1906 ayant r�tabli le repos dominical, rien n’emp�che les g�rants d’ouvrir leur commerce le dimanche s’ils le souhaitent. Melniczuk est de ces types qui se voient en chantres de la modernit�, qui sont seulement incultes et ignorants de l’Histoire sociale de leur pays, qui ignorent et se fichent de savoir pourquoi la soci�t� a fini par imposer le dimanche ch�m�. C’est fascinant.

Melniczuk s’en fout parce que la seule chose qui lui importe au fond est que les grandes enseignes du centre Mayol ouvrent le dimanche. Celles qui emploient suffisamment de salari�s pour assurer un turn over dominical, celles qui brassent du monde par paquet de douze... Celles qui sont � deux pas de son McDo. D’ailleurs son McDo est d�j� ouvert le dimanche, mais � quoi sert un McDo ouvert le dimanche si tous les commerces avoisinants restent ferm�s ?

Dans le meilleur des cas l’ouverture dominicale n’aidera que les grosses enseignes � se goinfrer un peu plus, et dans le pire des cas, elle fragilisera davantage les boutiques artisanales et familiales. Dans tous les cas, il vaut mieux pique-niquer � la plage que bouffer des hamburgers sous un n�on blafard.

Peu importe les mauvaises id�es que Melniczuk d�veloppe, apr�s tout, on n’est pas oblig� de l’�couter. Mais le probl�me commence quand les �lus en panne d’inspiration — ce qui est l’�tat naturel des �lus toulonnais — d�cident de le trouver dynamique et lui pr�tent une oreille attentive. On attend avec impatience le rapport de sa commission.

[1] Var matin 6 f�vrier.