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LETTRE D'INFORMATION |

Falco, le mauvais exemple des fusillés

lundi 9 novembre 2009
par Saint-Just

M. Hubert Falco, secrétaire d’Etat à la Défense et aux Anciens Combattants, a annulé un déplacement dans la Meuse qui devait consister en l’inauguration d’une stèle en hommage à deux officiers fusillés "pour l’exemple" pendant la Grande Guerre. Nouvelle reculade de notre héros des temps moderne !

BIEN que pardonnés par son Altesse Présidentissime Nicolas Sarkozy lors de son discours à Douaumont le 11 novembre 2008, les fusillés pour l’exemple ne font toujours pas l’unanimité dans le camp des trompettes en uniforme. La décision du maire de Toulon de ne pas se rendre près de Verdun n’a rien à voir ni avec une frilosité face au climat lorrain — n’était-il pas « très étonné » de n’avoir pas été convié, en octobre dernier, au déplacement du Président, sur le thème de l’accompagnement des restructurations militaires en Moselle ? —, ni avec une quelconque rébellion envers son chef. Elle conforterait plutôt, en cette période de pétainisme régional, la volonté gouvernementale de ne pas froisser les électeurs conservateurs, ceux qui aiment la terre qui ne ment pas, ceux qui continuent à penser que l’Armée est plus forte qu’un capitaine juif, ceux qui légitiment la torture au nom du péril terroriste.

Nous ne reviendrons pas sur les accointances électoralistes et idéologiques de la droite toulonnaise avec les nostalgiques de l’Algérie française. Nous avons déjà signalé les gerbes de notre maire ou ses projets de musée sur l’action positive de la colonisation française.

Hubert Falco a donc annulé un voyage meusien et n’a pas inauguré un monument aux fusillés pour l’exemple. Pourtant, l’ancien maire de Pignans, le toujours maire de Toulon, l’inamovible Sénateur du Var, aurait dû savoir combien le fanatisme guerrier a pu engloutir sous un amas d’obus et de boue la vie et l’honneur de millions d’hommes.

M. Falco pourrait se rendre au quartier du Pont-du-Las, s’il portait le moindre intérêt à ce quartier, et emprunter l’avenue du XVe Corps. Le XVe Corps ? Quesaco ?

Retour en arrière.

L’entrée en guerre de la France contre l’Allemagne, en août 1914, souleve, faute d’allégresse, un mouvement d’Union Sacrée. Ils ont tué Jaurès, la voie est libre. À Toulon, « la sonnerie de la générale a tous les carrefours, les coups sourds du canon de la passe et le tintement répété de la cloche de l’arsenal » soulignent la gravité de l’heure [1].

Après la proclamation par l’Italie de sa neutralité, les unités militaires du Midi, formant le XVe Corps, intégrées à la IIe armée du général de Castelnau, montèrent combattre « le boche » en Lorraine. Là, entre Dieuze et Morhange, « en un des points les plus difficiles du front, le XVe Corps, arrêté par un ennemi plus nombreux doté au surplus d’une artillerie lourde bien supérieure, dut se replier après avoir subi des pertes considérables », plus de 4000 morts. « Tous les témoignages, à commencer par ceux du président Poincaré, du général de Castelnau et de l’état-major allemand, concordent pour garantir que le XVe Corps s’était courageusement comporté et qu’il n’avait pas plus démérité que les autres unités françaises battant aussi en retraite ».

« Pourtant, le 24 août 1914, le sénateur Auguste Gervais, élu radical de la Seine, publia dans un grand journal parisien, le Matin, un incroyable article qui, avec une hautaine condescendance, mettait en cause la valeur combative de l’ "aimable Provence" et ravalait ses habitants dans une sous-catégorie, celle des Français de seconde zone, moins valeureux » [1]. Il indiquait que le « ministre de la Guerre, avec sa décision coutumière, a prescrit les mesures de répression immédiates et impitoyables qui s’imposaient ».

En fait, le sénateur avait rédigé son article à la demande de ce même ministre de la Guerre, son ami Messimy, un article qui « reflétait des préoccupations politiques très immédiates. L’état-major français, humilié par une retraite qui démentait les illusions entretenues jusque-là, cherchait à sauver la face [...]. Il fallait trouver une explication et un bouc émissaire : la Provence stéréotypée, pays du soleil, des farandoles et des "galéjades" faisait l’affaire ; elle serait le maillon faible de la solide chaîne française et porterait la responsabilité de l’échec. L’indignation qui s’éleva aussitôt dans le Midi prouva que les responsables militaires avaient commis une lourde maladresse » [1].

Le gouvernement tenta alors de calmer les esprits par un démenti mais précisa tout de même qu’il avait pris les mesures « de répressions nécessaires » contre les défaillants. Le mal était fait : « une mauvaise et durable réputation s’attachait désormais aux soldats du Midi : jusqu’en 1918, ils furent considérés avec soupçon, parfois insultés et brimés en raison de leur origine et de la couardise qui semblait s’attacher à celle-ci » [1] .

Cet épisode marque bien l’absurdité des jugements que l’on peut porter sur tel ou tel comportement en temps de guerre et Huberman donne la mesure de sa pleutrerie. Le foxtrot se déclenche au moment de monter au front des Régionales : il se réfugie dans sa bonne ville de Toulon. Attaqué sur les dépenses inutiles en dalles blanches et friables dont il contamine toute la cité : il coupe court au débat. Appelé à honorer la mémoire de militaires qui avaient échappé aux balles ennemies mais pas à celles de leurs généraux : il annule son déplacement... et les fusille une deuxième fois.

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Un poilu sur la langue...

Lors de la commémoration de l’Armistice au Hartmannswillerkopf, Falco a, selon L’Alsace.fr, abondamment insisté sur le sacrifice de ces hommes qui avaient 20 ans et des rêves plein la tête. « Pour eux, il n’y avait qu’un seul horizon, la guerre. Nous, notre horizon, c’est la paix, grâce à l’Europe. Mais il n’y aura pas de progrès possible sans une entente parfaite entre la France et l’Allemagne », a-t-il déclaré, faisant référence à la pensée de « Pierre Pfleming »… Sourire général dans l’assemblée, qui aura compris qu’il était en fait question de Pierre Pflimlin.

Et de la chance que cette même assemblée ne lui ait pas demandé de prononcer le nom du lieu de la commémo’, ç’aurait été la poilade !

logo & illustration : Tardi

[1] La Provence contemporaine de 1800 à nos jours, F.-X. EMMANUELLI et alii, Rennes, Ouest-France éditions, 1994, p.146-147.

  • Falco, le mauvais exemple des fusillés 29 novembre 2009, par (1 r?ponse)


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