L’INFORMATIQUE est vraiment un truc qui permet aux petits malins de développer leurs talents et aux gogos de se faire couillonner. Ne parlons pas des spams, c’est de la gnognotte à côté de ce qui suit.
Imaginons que vous vous appeliez par exemple Machin. Pourquoi pas ? Y a pas de honte et vous n’y êtes pour rien. Un beau jour vous recevez dans votre boîte à lettres (papier) une pub émanant d’une certaine Fondation Généalogie et Héraldique. Cette pub vous propose de découvrir « l’histoire passionnante de la famille Machin ».
Et là, on vous annonce un bouquin spécialement conçu à votre intention, dont le « registre généalogique couvre à lui seul 25 pages (1/3 de l’édition) et contient beaucoup de faits généalogiques à votre nom ». Cette œuvre immortelle, vous l’emportez pour 39,95€.
Première alerte, quand vous connaissez à peu près les tarifs de l’imprimerie, un bouquin de 75 pages pour ce prix-là, surtout en tirage confidentiel, ce qui le rend plus cher à réaliser, c’est donné.
Et pour faire joli on vous promet les « armoiries de la famille Machin ». Faites excuses marquise, on en tombe sur le cul. Vous ne saviez pas que vous aviez des armoiries ! Mais en lisant bien, on vous précise que c’est « une image splendide créée suivant les anciennes lois armoriales, de style actuel dans une composition de couleurs héraldiques séculaires... »
Donc, c’est bien exact. Vous n’aviez pas d’armoiries, mais maintenant on va vous en fabriquer de style actuel avec des couleurs séculaires. Le bleu, le jaune et le rouge, y a pas plus séculaire comme couleurs. Vous voyez bien que c’est sérieux !
Deuxième alerte. Vous prenez la peine de lire le prospectus jusqu’au bout, et en tout petit, vous tombez sur cette merveille : « Malgré l’utilisation d’excellentes sources généalogiques du monde entier, il faut souligner que les informations publiées ne seront pas complètes. Comme base des informations que nous publions servent uniquement les faits généalogiques de parenté nominale et rendent de ce fait l’édition particulièrement apte à servir de base pour une recherche généalogique complémentaire ». C’est du charabia, certes, mais vous comprenez que si vous voulez des infos fiables, vous n’avez qu’à faire la recherche vous-même.
Quant aux armoiries, on nous annonce (orthographe d’origine) : « Les armoiries sont une reproduction actuelle et n’offre pas de garantie sur l’authenticité ». On s’en doutait bien un peu.
Comme vous avez l’esprit tatillon, vous vous dites qu’en allant sur société.com, vous aurez quelques renseignements sur l’entreprise Fondation Généalogie et Héraldique. Manque de chance, pour accéder à sa fiche, il vous faut le numéro SIREN. Le hic, c’est que le prospectus ne vous indique que le numéro du registre du commerce, ce qui, en la circonstance, ne sert à rien. Vous n’en démordez pas, et, puisqu’on a la bonté de vous donner l’adresse, vous allez voir un peu du côté des pages jaunes.
Troisième alerte. A l’adresse indiquée, la mirifique fondation est inconnue des pages jaunes.
Quatrième alerte. Ces gens-là indiquent un numéro de téléphone. Vous allez donc les appeler pour leur demander leur numéro de SIREN qui vous permettra...(voir plus haut). Vous tombez sur une boîte vocale. Le 1 c’est pour faire une commande, le 2 pour avoir des informations, le 3 pour l’état de la commande. Chic alors, si on peut avoir des informations avec le 2, on fait le 2. Et là, la voix artificielle vous annonce que « vu la complexité de la généalogie, on ne peut répondre qu’à des questions écrites ». Et on vous annonce que la communication va être interrompue.
Bon, on ne va quand même pas lâcher le morceau. Sur votre moteur de recherche vous tapez l’intitulé de la boîte. Et là, vous tombez sur un forum où diverses victimes vous en apprennent un peu plus sur l’opération. On y découvre donc que la fondation en question a son siège à Rotterdam, d’où la difficulté à la trouver dans les pages jaunes à Roissy, que le numéro de registre du commerce est celui en vigueur ...aux Pays-Bas, que son promoteur est un certain Willem Lambertus Johannes Pince Van de Aa, ce qui ressemble à un vrai noble. Mais que M. Pince, dont les affaires sont déjà appréciées dans son pays, en Allemagne et en Belgique, s’est fait justement pincer et a connu quelques déconvenues judiciaires.
Il vous reste un dernier moyen de vengeance. L’imprudent M. Pince est tellement convaincu que vous allez tomber dans le panneau qu’il a eu la bonté de vous adresser une enveloppe « T ». Postez donc cette enveloppe, complétée peut-être de remarques laissées à votre juste appréciation. Bien sûr, ça ne suffira pas à changer le monde, mais ça fait tellement du bien...
Carolus
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