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LETTRE D'INFORMATION |

Radio Active dans la panade

samedi 7 octobre 2006
par Gilles Suchey

Ceci est un appel à l’aide. La seule radio associative généraliste et non cultuelle de l’agglomération toulonnaise vit de sales moments. Ou plutôt : a vécu de sales moments.
Son fonctionnement s’est normalisé mais les caisses restent vides.

TOULON est un port militaire avec tout ce que cela implique en matière de sécurité et d’usages réservés. Il ne faut pas que la diffusion radiophonique puisse nuire aux transmissions de la Défense. Même si les bandes FM sont théoriquement bien disjointes, les brouillages sont possibles par la proximité des émetteurs.

Ici sans doute plus qu’ailleurs, la lutte est donc âpre pour l’obtention d’une fréquence et sa conservation. Les auditeurs n’ont pas grand-chose à se mettre entre les oreilles : vingt-six radios seulement dont deux de catégorie A ("associatives non commerciales"). Si on écarte RCF, réseau catho d’origine lyonnaise, il ne reste plus que Radio Active. A titre de comparaison avec une ville de taille analogue, Grenoble dispose d’une quarantaine de programmes dont une dizaine de catégorie A.

Active est née en 1991 à l’initiative d’une association de consommateurs, sous la présidence de Gérard Battesti. Elle fut d’abord ouverte à des émissions plutôt orientées vers le secteur associatif et les communautés — public adulte. Après la disparition de Battesti, des programmes musicaux très spécialisés investirent la grille — public nettement plus jeune. Les loups dans la bergerie, maugréaient les héritiers. On opposa les deux tendances. Les "communautaires", gardiens du temple, contre les "musicaux", ignorants du passé et fauteurs de troubles. Chaque équipe fourbissait ses émissions, faisait entrer de nouveaux membres pour peser sur l’assemblée générale. Au plus fort de l’agitation, Active accueillait 130 bénévoles plus ou moins animateurs.

Parce qu’il faut bien évoquer les raisons.

Elle se voulait radio de toutes les couleurs. Belle idée qui n’aboutit pas à une pratique convaincante. Par le jeu des influences et l’inconséquence du bureau, constitué de militants de la première heure qui s’enfermaient chaque jour un peu plus dans l’appropriation et l’autocratie — après tout, c’est nous qui avons fondé la radio, vous n’avez qu’à faire pareil —, on confondit pluralisme et capharnaüm, diversité et incohérence. Au final, la soupe indigeste étouffa tout le monde. Surtout l’auditeur. Seuls quelques animateurs repliés sur leur petit univers personnel y trouvaient leur compte en souhaitent que rien ne change, jamais. Radio Active : un agglomérat de micro-corporatismes cultivant la méfiance et la parano. On dit rarement à quel point le bénévolat, nerf de la guerre associative, peut plomber le fonctionnement de la structure qu’il est censé défendre.

Jusqu’à l’impensable : les rares membres à défendre un projet global étant systématiquement renvoyés à leurs chères études, ils convoquèrent la Justice pour arbitrer la situation.

Deux ans après le début de la procédure (2002), le juge donne raison aux plaignants et nomme un administrateur judiciaire. C’est là que ça devient vraiment spécial. De longs mois s’écoulent encore sans qu’un mandataire ne tape à la porte : le tribunal est incapable de faire appliquer sa propre décision. La radio continue d’émettre, les émissions se succèdent mais il n’y a — vraiment — plus personne aux commandes. Quinze mois plus tard un administrateur se manifeste enfin, convoque une assemblée générale et annonce la quasi-cessation de paiement.

Alors que l’existence même des radios associatives est menacée au niveau national (par la remise en cause du FSER - Fond de Soutien à l’Expression Radiophonique), Active réalise le prodige de s’auto-asphyxier sans que Donnedieu ni les collectivités locales ne puissent être mis en cause : par les lenteurs tiers-mondistes de l’administration judiciaire et l’incurie de ses ex-dirigeants.

Car pendant ces quinze mois, les gardiens du temple se garderont bien de signer et envoyer les demandes de subventions en souffrance.

Voilà pour l’histoire.

Une nouvelle équipe se retrouve à la barre d’un navire en perdition. Exit les salariés (il y eut jusqu’à cinq emplois aidés en même temps), plus aucun technicien pour gérer les émissions diurnes. La radio ne diffuse que de la musique en attendant des jours meilleurs et faisant le gros dos jusqu’aux prochaines subventions. Mais, point positif et fondamental : l’ambiance interne est apaisée.

L’avenir d’Active, conditionné à l’épée de Damocles financière, est couché sur le papier. Remettre les caractères social, local, culturel et les auditeurs au premier plan. Définir une grille exigeante, audible, équilibrée entre programmes parlés et émissions musicales. Reprendre la création radiophonique, donner la parole à ceux à qui on demande en général de se taire, devenir enfin un point nodal dans le tissu socio-économique et culturel toulonnais.

L’agglomération toulonnaise pourrait être à brève échéance la seule de son envergure (500.000 âmes) à ne disposer d’aucune radio associative non cultuelle ! les émissions locales se résumeront alors au quart d’heure de décrochage quotidien sur RTL, radio indépendante bien connue, ou aux brèves chroniques de France Bleu. On ne comptera pas sur les radios régionales qui ont choisi l’option commerciale. Elles clonent leurs concurrentes nationales pour quelques parts de marché, utilisent les mêmes outils — hystérie du ton et lobotomie à tous les étages. Il faut bien vivre.

Le nouveau Conseil d’administration d’Active s’est tourné vers la ville de Toulon en faisant valoir sa spécificité et le caractère essentiel de sa survie pour l’intérêt général. Réponse laconique : « la ville n’accorde pas son soutien aux radios associatives » (on appréciera le pluriel de la formule ; à croire que Falco déborde de demandes).

Voilà pourquoi Active se voit aujourd’hui contrainte d’alerter le public d’ici et d’ailleurs. Des semaines difficiles s’annoncent. Si la radio passe l’hiver, réussit à régler son loyer et rembourser quelques traites, la partie sera sans doute gagnée. A vot’ bon coeur m’sieurs dames.

GS, membre du Conseil d’administration

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RADIOACTIVE
Brunet E1
136 avenue de l’Elisa
83100 TOULON

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