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Toulon, les ann�es de plomb
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Huit ans de solitude au Parquet de Toulon LE DOSSIER ALBERT LÉVY (2/2) lundi 1er mars 2004 par Gilles Suchey Suite du dossier consacr� � un magistrat jadis en charge de grand banditisme sur l’aire toulonnaise. O� chercher des r�ponses � des questions que personne ne pose s’av�re d�raisonnable. O� porter un nom juif n’arrange rien, m�me si ce n’est pas le noeud du probl�me. l ne s’agit pas de d�crire ici les faits reproch�s officiellement au substitut L�vy. A-t-il oui ou non viol� le secret professionnel ? Ses juges trancheront. Patriotes contre "apatride"Albert L�vy est d�j� en poste � Toulon depuis quatre ans (1991) quand le Front national s’empare de la mairie. C’est s�r : contrairement � certains coll�gues adeptes de d�ners en ville, il ne cherchera jamais � se faire appr�cier de Jean-Marie Le Chevallier. Les d�tracteurs r�actionnaires de L�vy ne sont pas tous inscrits au FN. On les compte aussi dans les rangs de l’APM [1], un syndicat tr�s droitier dont certains membres �margent au tribunal de Toulon. Alain Terrail, avocat g�n�ral pr�s la Cour de cassation et pr�sident d’honneur de l’APM, publie en 1998 une tribune � charge contre Albert L�vy dans le n°10 de la revue interne Enjeu justice. Toujours � propos de sa mise en examen. Elle se conclut sur ces termes : « tant va L�vy au four... Qu’� la fin il se br�le ! » [2] . On le voit, les origines du substitut lui interdisent un certain type de soutien... Affirm� ou sous-jacent, l’antis�mitisme n’est pourtant pas � la source de ses ennuis. Parlons plut�t d’un outil, d’un levier. Le patronyme "L�vy" permet � ses adversaires les moins philos�mites de justifier son hostilit� � leur endroit, en �vacuant ce qu’on pourrait objectivement leur reprocher. Surtout, il permet � d’autres d�tracteurs plus sournois d’organiser leur campagne de d�stabilisation... L’importunEn insistant sur ses origines, en jouant sur ses relations conflictuelles avec le FN et en lui inventant une n�vrose parano�aque, on pourra facilement marginaliser le substitut... Et occulter les aspects les plus g�nants de ses travaux. Albert L�vy n’est pourtant pas ce tr�s caricatural « Don Quichotte voulant pourfendre le parti politique dominant, [agissant] par communalisme ( ?) de croyance et id�ologique » [3] que l’on d�nonce. S’il s’�tait content� d’emb�ter le FN, le retour de manivelle aurait sans doute �t� moins violent. Mais le magistrat en charge de grand banditisme �pluche d’autres dossiers. Il n’h�site pas � pondre des rapports d�non�ant les ratages des institutions polici�res et judiciaires. Ratages plut�t fr�quents d�s qu’on approche le nom de Yann Piat. « En huit ans, [L�vy] a connu toutes les affaires du Var, dont les plus importantes auraient d�bouch� sur autre chose que de simples r�glements de compte si des ordres opportuns de sa hi�rarchie ou de mauvaises volont�s polici�res n’avaient emp�ch� la poursuite des investigations. L’affaire Piat intervient alors comme le point d’orgue de toutes ces affaires dans lesquelles Albert L�vy, simplement parce qu’il conna�t la situation et tente de faire son travail, joue le r�le d’un trublion dans les soubresauts li�s aux reclassements politico-mafieux qui s’op�rent dans le Var depuis plusieurs ann�es. C’est lui, notamment qui, � plusieurs reprises, a averti sa hi�rarchie judiciaire des menaces pesant sur Yann Piat, apparues notamment lors d’�coutes t�l�phoniques, sans susciter une quelconque r�action de la part de cette derni�re » [4]. Le substitut ne se satisfait ni de la rapidit� avec laquelle sa hi�rarchie blanchit le vice-pr�sident du Conseil g�n�ral (�poque Arreckx), dans l’affaire des violences � r�p�tition contre Yann Piat lors de l’ultime campagne �lectorale de celle-ci [5], ni des conclusions du proc�s des assassins pr�sum�s de la d�put�e. On lui demande d’ailleurs de t�moigner lors de ce proc�s, de la m�me mani�re que l’on convoque certains journalistes contestant la th�se officiellement propos�e... et finalement retenue (des petits malfrats ont abattu la d�put�e sur ordre d’un truand � peine plus gros) : « lors du proc�s des assassins de Yann Piat, le substitut L�vy [a] fait part de ses doutes quant � la volont� de la justice de faire �clater la v�rit� sur ce crime [...]. Il [a] alors �voqu� les relations difficiles qu’il entretenait avec certains magistrats, "dont la s�r�nit� confine � la nonchalance" » (Le Monde, 9 septembre 98). Dans un rapport de 1996 adress� au Procureur de Toulon et cit� par Sophie Coignard (La vendetta fran�aise, Albin Michel, 2003), L�vy �voque un gang toulonnais � la t�te duquel s�vissent deux fr�res : « "Les Perletto" r�v�laient savoir l’identit� des assassins de Mme Piat mais souhaitaient s’exprimer exclusivement devant M. Charles Pasqua, ministre de l’Int�rieur. » Selon Sophie Coignard, L�vy n’arr�te pas la r�daction du rapport � ces lignes. Il raconte aussi « comment des interm�diaires ont organis� une rencontre � laquelle assistaient des repr�sentants du minist�re de l’Int�rieur. Les Perletto auraient donn� la bande du "Macama". Ce sont ces membres qui seront condamn�s pour l’assassinat de Yann Piat, malgr� la faiblesse du mobile. » Enfin, le substitut s’interroge : « dans quelles conditions les Perletto ont eu � conna�tre l’identit� des assassins de Mme Piat ? [...] Pourquoi la haute hi�rarchie polici�re ainsi que celle du minist�re de l’Int�rieur se seraient pr�t�es � cette n�gociation ? Quels types de rapports sont susceptibles d’entretenir des malfaiteurs comme "les Perletto" avec ces personnalit�s administratives ou politiques ? » Un seul substitut en charge de grand banditisme � Toulon et il fallait que ce soit cet emmerdeur. Un emmerdeur qui finalement reste bien impuissant : il se contente d’�crire des rapports d�rangeants. Si tu veux tuer ton chien...Comment rendre id�al le Palais de justice toulonnais ? D’abord, on peut proposer au substitut d’organiser son d�m�nagement. En 1996, « Jean-Charles Marchiani demande au procureur de Toulon d’obtenir la mutation de ce magistrat "dans son propre int�r�t" et parce qu’il "trouble l’ordre public". [...] Le procureur g�n�ral d’Aix en Provence, quelque temps plus tard, rend visite au substitut pour lui proposer une belle promotion � Paris » [6]. Il refuse. On peut utiliser d’autres m�thodes. Certains coll�gues mettent L�vy en garde de fa�on plus ou moins amicale : il m�ne une vie dangereuse. En janvier 96, alors qu’il se trouve au volant de sa voiture attendant qu’un feu passe au vert, deux hommes � moto simulent un tir � bout portant dans sa direction... Et quelques temps plus tard, le g�niteur des Perletto vient l’assurer de sa protection car, dit-il, « le sang a assez coul� dans le Var ». Une d�licate attention. Y-aurait-il encore d’autres voies � explorer ? Albert L�vy est depuis 1999 substitut au Parquet de Lyon et n’�crit donc plus de rapports pour le tribunal de Toulon. Mais la -tr�s longue- proc�dure judiciaire qui l’int�resse attendra mars 2004 pour conna�tre son d�nouement. Ses partisans parlent "d’acharnement". Merci � la LDH Toulon. Soutiens � Albert L�vy : [1] Association Professionnelle de la Magistrature. [2] Des mots dont jailliront le scandale et la condamnation de Terrail. Pour att�nuer le discr�dit jet� sur l’APM, son pr�sident Georges Fenech envisagera m�me sa dissolution. Puis l’eau coulera sous les ponts... En 2004 l’histoire para�t lointaine. Fenech n’est plus pr�sident du syndicat mais d�put� UMP du Rh�ne, et il a vot� les lois Perben. Pour plus d’infos sur l’APM, lire cette note du R�seau Voltaire. [3] Mots (rapport�s par des journalistes) du procureur adjoint Michel Raffin lors du proc�s concernant les cantines scolaires de Toulon en 2001. Ce proc�s verra la relaxe de Jean-Marie Le Chevallier. [4] Pierre Jacquin, Justice n°158 - organe du Syndicat de la Magistrature, novembre 1998. [5] Cet homme, Jo Sercia, est dissident de l’UDF et adversaire de Piat aux l�gislatives de 1993. [6] In la vendetta fran�aise.
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